Le raifort – en Alsace et ailleurs


Origines

Le raifort, raphanus rusticanus, de la famille des crucifères, cousin des choux et de la moutarde, est une racine à longues feuilles et à fleurs blanches ou jaunes dont le nom signifie « racine forte ». Le mot « raifort » naît en France, au XVe siècle, de « raïz » -racine- et de « fort » -âpre-, signifiant « racine piquante ». Originaire d’Europe de l’Est, on l’appelle aussi « moutarde des allemands » ou « radis de cheval ».

Consommé dans l’Antiquité par les Égyptiens, elle apparaît dans le récit de l’Exode devenant depuis un condiment incontournable des repas de la Pâques juive (Pessa’h). Les Grecs et les Romains connaissent ses propriétés médicinales. Les peuples slaves la propagent en Europe au XIIe siècle. Au Moyen-Âge, le raifort est un ingrédient de la cervoise. Riche en vitamine C, il sert à traiter le scorbut, les rhumatismes, la goutte, les maladies rénales, les empoisonnements, la jaunisse, l’eczéma ou les poux ! Tombé un temps dans l’oubli, il est revenu sur nos tables et dans notre pharmacopée.

Raifort © Missouri Botanical Garden’s Materia Medica, page 6727240

Dans la Pâque juive

Le Séder de Pessa’h, rituel de la Pâque Juive célébré entre mars et avril, commémore le retour à la liberté après les années d’esclavage en Égypte. On dispose dans un plat sept éléments symboliques : trois Matzoth composés de farine – orge, blé, avoine, seigle et épeautre – et d’eau; le Maror ou herbes amères telles que le raifort; le Karpass ou légumes frais tels que persil, céleri, radis ou pommes de terre; de l’eau salée évoquant les larmes des esclaves; le Harosseth pâte de dattes, noix, amandes, cannelle, pomme et vin évoquant les briques fabriquées par les esclaves; le Zerowa‘, os symbole du sacrifice de l’agneau pascal dans l’ancien Temple de Jérusalem; un Bēṣa, oeuf rappelant la destruction du Temple de Jérusalem; les H’azéret , nouvelle portion d’herbes amères.

Séder de Pessa’h © Robert Couse-Baker

Production

On produit le raifort en Russie du sud, Ukraine, Asie occidentale, Allemagne, Angleterre et Amérique du Nord (Illinois). En France, une quinzaine d’agriculteurs le cultivent encore, uniquement dans le Bas-Rhin. Au printemps, on le plante en biais pour qu’il reste au plus près de la surface. Il faut cinq personnes pendant huit heures pour couvrir un hectare. Originaire des pays de l’Est, le raifort supporte un climat froid. Selon les régions, on le récolte sur trois mois étalés entre fin septembre et janvier (tous les mois en « R »). Le soulèvement des racines est la seule opération réalisée mécaniquement. L’ébourgeonnement à l’été, puis l’extraction, la collecte, le tri et le nettoyage, en automne-hiver, se font à la main soit 600 à 800 heures de travail annuel pour un hectare contre vingt-cinq à trente pour du blé, selon Christophe Scharrenberger président de la coopérative Alsace Raifort. Le raifort est conditionné dans des sacs de vingt-cinq kilos.


Bienfaits

On l’utilise dès le Moyen-Âge contre les rhumatismes, la goutte et les douleurs articulaires. Sa teneur en vitamines C (équivalente à celle des agrumes) et en antioxydants aide à soigner le scorbut. C’est aussi un remède contre les bronchites, sinusites et infections urinaires. Il permet de réguler la tension sanguine. Il aurait des effets sur les cellules cancéreuses.

Une consommation trop importante de raifort peut entraîner des irritations de la gorge, de la bouche et de l’estomac voire des vomissements. Il est déconseillé aux femmes enceintes ou allaitantes, aux très jeunes enfants, aux personnes souffrant de troubles de la glande thyroïde, de problèmes d’estomac ou d’intestins, d’une maladie rénale ou présentant une allergie à cette plante. Il est préférable d’éviter de l’associer avec certaines plantes présentant des propriétés anticoagulantes, comme l’angélique, le curcuma, l’ail, le clou de girofle, le gingembre, le ginseng asiatique, le ginko biloba, la sauge rouge et le trèfle des prés. Il peut également modifier les effets de certains médicaments. Les cataplasmes de raifort râpé peuvent irriter la peau s’ils sont utilisés trop longtemps.

Armoracia rusticana – Pethan – Jardin Botanique Utrecht Hollande

Cuisine

En Alsace, jusque dans les années 50, les Alsaciens en plantaient dans leur jardin et le consommaient durant l’hiver. Depuis le raifort frais se trouve rarement chez les primeurs. Le cas échéant, choisir des racines fermes et lisses sans taches marrons ni traces de moisissures et laisser le cœur trop dur et ligneux et les parties vertes trop amères. Attention au moment de l’éplucher : il fait davantage pleurer que l’oignon et brûle beaucoup ; son piquant commence par les narines. On le râpe à la dernière minute pour en conserver la saveur et on le citronne pour en garder la blancheur. En Allemagne et dans les pays de l’Est, il est encore présenté sur la table avec une râpe pour le consommer frais. On peut le conserver mariné dans du vinaigre. Rarement cuit, il se rajoute alors en fin de cuisson. Pour le transformer en condiment, il est stocké en chambre froide, ébarbé, épluché à la machine et à la main, râpé au cutter puis écrasé à la meule et broyé plusieurs fois jusqu’à l’obtention d’une pâte fine. Proposé nature, mélangé à de la mayonnaise ou simplement incorporé dans de la crème fraîche, il accompagne idéalement le pot-au-feu, la choucroute, le poisson fumé, les viandes blanches ou rouges servies froides, les assiettes anglaises, la betterave, la carotte râpée, le chou-rouge, le fromage de chèvre, les fruits de mer et relève finement un jus de tomate. En Angleterre on l’associe au roastbeef et au Japon, sous forme de wasabi, au poisson cru. Il est moins célèbre que le wasabi qui lui vole la vedette, pourtant lui aussi à base de raifort. Le raifort est essentiellement consommé en France, en Alsace et en Moselle, transformé à Mietesheim (67) par Alélor à découvrir ici.

© D’Alsace et d’ailleurs

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